112 DAY - Entretiens avec les collaborateurs des Centrales d’Urgence

Centrale d'urgence 112
Campagne d'information
La Région de Bruxelles-Capitale et chaque province sont pourvues d’une Centrale d’Urgence (CU) 112 à l’exception du Brabant wallon où les appels sont traités par la CU du Hainaut. Chaque CU 112 a dû s'adapter à la crise de la COVID-19. Découvrez le témoignage de Sofie Vanhoutte, Chef de service de la CU 112 de Flandre orientale, Samuel Stipulante, Chef de Service de la CU 112 de Liège et Carole et Sylvie, opératrices à la CU 112 de Liège.

Entretien avec Sofie Vanhoutte, Chef de service de la Centrale d’Urgence 112 de Flandre orientale et Samuel Stipulante, Chef de Service de la Centrale d'Urgence 112 Liège

Sofie Vanhoutte, Chef de service de la Centrale d'Urgence 112 de Flandre orientale :

« Afin de garantir la continuité du numéro d'urgence 112 et du numéro 1733, il est important que vous sachiez à qui poser vos questions. Si vous avez un smartphone, vous pouvez par exemple consulter le site web www.112.be pour savoir à qui vous adresser. Le numéro d'urgence 112 est uniquement consacré aux urgences. Il existe également d'autres numéros tels que le 1733 pour le médecin de garde et la ligne d'information Corona : 0800 14 689. »

Samuel Stipulante, Chef de service de la Centrale d’Urgence 112 de Liège

« L’opérateur est là pour vous aider et vous guider. Répondez à toutes ses questions pour que le moyen d’intervention le mieux adapté puisse intervenir le plus rapidement. Afin de gagner du temps, nous vous conseillons de télécharger de manière anticipative l’APP 112 qui nous permet de vous localiser où que vous soyez. »

Quelles sont les règles sanitaires en place dans les CU 112 ?

Sofie Vanhoutte : Au sein de la CU 112 de Flandre orientale, nous avons habituellement 4 équipes d'opérateurs qui travaillent selon un régime horaire fixe composé de 12 heures de service de jour suivies de 24 heures de repos à la maison et de 12 heures de service de nuit suivies de 48 heures de repos à la maison. Les équipes de renforts et les chefs d’équipe travaillent selon un régime horaire flexible. Ces deux équipes travaillent en rotation et sont donc amenées à entrer en contact avec les 4 autres équipes. En raison de la Covid 19, nous avons dû abandonner ce principe dès la première vague.  Chaque opérateur et chef d'équipe a été assigné à une équipe fixe afin de limiter le risque de contamination. Nous pouvons affirmer avec fierté qu'à ce jour, aucun opérateur de la CU 112 de Flandre orientale n'a été contaminé. Tous les opérateurs ont redoublé d'efforts tant sur le lieu de travail que dans leur sphère privée pour éviter toute contamination et ainsi garantir la continuité de service.

Samuel Stipulante : Nous avons aussi réorganisé le travail en constituant des équipes fixes d’opérateurs et en instaurant un planning de garde pour l’équipe de direction afin de soutenir au maximum les opérateurs dans leurs missions journalières. Ma plus grande crainte est de voir nos opérateurs touchés directement par le virus. C’est pourquoi nous avons mis en place plusieurs mesures sanitaires strictes sur le lieu de travail : isolement total du service, travail en équipe fixe, sans oublier les mesures barrières telles que la désinfection des mains, du mobilier et des postes des opérateurs à chaque changement de garde. Mais nul n’est à l’abri. Heureusement, nous développons également des procédures de backup continuity plan avec le soutien des services centraux du SPF Intérieur.

Quel est l'impact sur le travail quotidien des opérateurs ?

Sofie Vanhoutte :Pendant la première vague, il fallait chaque jour trouver de nouvelles solutions et s'adapter. Nos opérateurs gèrent les interventions médicales sur base d'un protocole spécifiquement développé pour la Covid-19. Nous en apprenions chaque jour un peu plus sur le virus et devions donc adapter quotidiennement les directives et procédures. Pour ce faire, nous avons été soutenu par la direction médicale et une concertation de crise se tenait régulièrement au niveau de notre service mais également avec ceux du Gouverneur. 

Samuel Stipulante : Depuis le début de la crise, nous avons aussi fait face à ces nombreux changements dans les procédures de gestion des appels. Il a fallu dans des temps très courts former les opérateurs, évaluer les protocoles, les adapter et monitorer l’activité au sein de notre CU. Cela a été très difficile et cela reste difficile à ce jour. Nous avons revu notre organisation afin de préserver au maximum nos opérateurs qui sont les premiers maillons de la chaîne dans le cadre de la lutte contre la pandémie. L’impact psycho-social des mesures sur le personnel a aussi été pris en compte, ce qui a engendré une charge de travail supplémentaire pour nos équipes d’encadrement.

Sofie Vanhoutte : Nous avons en outre dû veiller à assurer les tâches routinières. Les opérateurs devaient suivre des formations de recyclage tandis que les nouveaux collaborateurs devaient être formés. Tous les collaborateurs de la Centrale d'urgence 112 ont su se « réinventer » chaque jour afin de proposer le même service à la population dans le cadre imposé par les nouvelles directives COVID 19.

Samuel Stipulante : Pour ce qui est des formations en continu des opérateurs et des nombreuses réunions de staff, nous nous sommes adaptés en utilisant la visioconférence. L’ensemble de l’équipe s’est très vite adapté.

Quel est l'impact sur la charge de travail ?

Samuel Stipulante : Il y a eu plusieurs vagues de pics épidémiques et nous avons constaté les mêmes pics dans notre charge d’appels. Lors des phases ascendantes, nous avons dénombré 30% d’activité supplémentaire à Liège principalement dû à la Covid.

La charge de travail a fortement fluctué suivant les pics pandémiques et les taux d’hospitalisation. Pendant la première phase de montée de la pandémie, 50% de nos appels concernaient des cas de Covid-19. Pendant les vagues suivantes, les motifs d’appels ont été plus variés. Les appels Covid se sont ajoutés à nos appels d’urgence classiques. La différence des deux dernières vagues par rapport à la première est le maintien d’une activité classique importante telle que des traumatismes ou des accidents de circulation.

Lors de la seconde vague, nous avons collaboré essentiellement aux transferts médicalisés de patients Covid-19 d’une province à l’autre, voire même parfois vers l’international, afin d’équilibrer la charge hospitalière sur l’ensemble du territoire belge. Le travail des CU 112 a véritablement contribué à ne pas dépasser le seuil de saturation hospitalière sur notre province !

Sofie Vanhoutte : Le confinement très strict de mars et avril 2020 a provoqué en Flandre orientale une baisse du nombre d'interventions médicales de 1000 interventions en avril par rapport aux autres mois. Comme le dit Samuel, de nombreux appels étaient liés au COVID mais tous les autres appels de routine tels que les accidents de la route, les incidents industriels, les accidents de travail étaient minoritaires. Le deuxième confinement n'a quant à lui pas provoqué de différence dans le nombre d'interventions médicales et a même engendré une légère augmentation.

 

Entretien avec Carole et Sylvie, opératrices à la Centrale d’Urgence de Liège

Carole, opératrice à la Centrale d’Urgence 112 de Liège 

« Après chaque garde, de journée ou de nuit, je rentre chez moi avec le sentiment d’avoir fait un petit quelque chose pour aider et sauver des personnes dans le besoin. »

Sylvie, opératrice à la Centrale d’Urgence 112 de Liège : 

« Je suis quelqu'un de sociable et j'aime venir en aide aux gens, les rassurer et les conseiller. L'aide à la population est mon carburant. »

Depuis combien de temps travaillez-vous pour la Centrale d'Urgence ?

Carole : Je travaille au Centre d’urgence 112 de Liège depuis septembre 2012.

Sylvie : Je suis entrée en service en septembre 2013, j'ai donc entamé ma 9ème année au CU112 de Liège.

Pourquoi travaillez-vous pour une Centrale d'Urgence ?

Carole : Lors de mes études, il était évident que je voulais me diriger vers un emploi qui soit au service des citoyens. J’avais ce besoin de me sentir utile et de venir en aide aux personnes mais également une passion pour le domaine médical et des secours. Le travail dans une Centrale d’Urgence regroupe tous ces points importants qui me permettent de m’épanouir professionnellement. 

Sylvie : Je suis quelqu'un de sociable et j'aime venir en aide aux gens, les rassurer, les conseiller. L'aide à la population est mon carburant.

Quel en a été l'impact sur votre travail ?

Carole : Il est certain qu’il a fallu s’adapter à la pandémie. Avant la Covid, nous faisions régulièrement des échanges de garde ou nous étions amenés à renforcer d’autres équipes. Cette pratique est désormais proscrite. Chaque opérateur doit à présent rester au sein de son équipe afin de limiter au maximum les contacts superflus et respecter une « bulle d’équipe ».

Le port du masque lors de tous déplacements dans la Centrale 112 est devenu la norme comme la désinfection du mobilier lors des changements d’opérateur.  La direction a fourni, à chaque membre du personnel, le matériel nécessaire au respect des règles en vigueur.

Remarquez-vous une différence dans les appels durant cette pandémie ?

Carole : Avec l’arrivée de la Covid, les appels ont bien entendu changés. Il y avait un nombre important d’appels de personnes qui présentaient des symptômes et pour lesquelles l’envoi d’une ambulance était nécessaire. Nous avons également eu un bon nombre d’appels pour répondre aux questions et aux inquiétudes des citoyens.  Certains appelants sont dans un état de stress intense face à la crise. Il est de notre devoir de les rassurer et de les guider au mieux vers un médecin traitant, les renseigner sur la localisation d’un centre de dépistage ou sur l’envoi des secours.

Le couvre-feu fait en sorte qu’il y a moins de monde en rue, dès lors les interventions « habituelles » sont plus rares comme les bagarres ou les accidents de la circulation. Nous constatons cependant une recrudescence des appels liés à des problèmes d’instabilités émotionnelles ou psychiatriques tels que des dépressions, un sentiment de solitude aigüe ou des pensées suicidaires.                                  

En temps de Covid, nous percevons aussi plus intensément le stress de la population. Nous avons fait face au désarroi et au questionnement d’une partie de la population. Les personnes qui vivaient mal la solitude avec le confinement nous appelaient plus régulièrement pour discuter et être rassurées.

Est-ce que les directives pour traiter les appels ont aussi changé ?

Carole : Comme pour chaque problématique, notre direction médicale a dû s’adapter en créant de nouvelles procédures. La direction 112 est présente en permanence afin de nous guider, de gérer la charge de travail supplémentaire mais surtout pour nous aider à prendre les décisions importantes relatives à la pandémie.

Les opérateurs ont dû s’adapter également et nous avons adapté notre façon de questionner les personnes. Nous devons désormais cibler le risque éventuel de Covid dans chaque appel. Il est primordial de relever cette information lors de l’appel dans le but de la communiquer aux intervenants qui prennent les risques sur le terrain qui peuvent ainsi s’adapter afin de diminuer au maximum le risque de contamination de la chaine des secours. Nous recevons très régulièrement, de nouvelles procédures et des mises à jour régulières.  

Quel a été l'appel le plus difficile que vous avez géré ?

Carole : Il s’agissait d’un appel pour un incendie dans une maison. Le papa est sorti sur le toit avec son bébé d’un an dans les bras. Les flammes atteignaient la toiture et ses pieds étaient en train de bruler. Je suis restée en ligne avec lui jusqu’à l’arrivée des secours. J’ai dû garder mon calme, et le rassurer mais je ne savais rien faire de plus. La gestion fut très difficile. Fort heureusement, les pompiers sont arrivés avec l’échelle et ont pu le secourir avant la catastrophe.

Sylvie : Pour ma part, ce sont les appels concernant les enfants. Étant maman de 2 enfants, c'est parfois un peu plus difficile selon la gravité. Il faut essayer de calmer les parents qui sont en perte de compétence et surtout les rassurer afin de pouvoir les aider au mieux grâce aux conseils à l’appelant  que nous mettons en place.

Quelle satisfaction et quelle reconnaissance tirez-vous de votre travail ?

Carole : Après chaque garde, de journée ou de nuit, je rentre chez moi avec le sentiment d’avoir fait un petit quelque chose pour aider et sauver des personnes dans le besoin. C’est plutôt gratifiant et c’est avec cette même envie que j’y retournerai toute ma carrière. Je reçois également régulièrement des marques de soutien de mon entourage qui comprend et admire ce que je fais.

Sylvie : De la satisfaction, surtout quand le patient est pris en charge vers l'hôpital, nous sommes le premier maillon de la chaîne et il est important d'être efficace. Pour ce qui est de la reconnaissance, cela dépend des appelants. Le système étant méconnu du public, il est parfois compliqué de le faire comprendre aux requérants mais nous pouvons compter sur le soutien de notre entourage et il arrive parfois qu'on ait une marque de gratitude de la part des appelants.

Avez-vous des conseils pour les appelants ?

Carole : Il y a avant tout les conseils émis dans les spots publicitaires du www.112.be. Utilisez les moyens mis à disposition comme l’App 112 BE et lorsque vous êtes en ligne avec un opérateur, veillez à être le plus précis possible et appliquez nos conseils en attendant l’arrivée des secours.

Sylvie : Comme le dit Carole, surtout précisez-bien votre localisation. Nous avons besoin d’une adresse complète et correcte pour intervenir le plus rapidement possible. Enfin, gardez votre calme pour répondre aux questions que nous vous posons.